19/08/2025
Par l'Union interdépartementale MRC Nouvelle-Aquitaine
Le récent feu en sud Charente, dans le massif de la Double, a nécessité la mise en œuvre de moyens importants pour en venir à bout, avec recours à des renforts venus d’autres départements. En septembre 2022, le sud Charente avait déjà subi le plus important incendie enregistré dans ce département. En rembobinant le déroulé des faits et en sachant que les risques de sécheresse et de canicule vont croître au cours des prochaines années, il faudra disposer du nombre d’hommes et de matériels portés au niveau et à l'échelle du risque d'incendie. Ce postulat est valable en Charente tout comme au niveau de l’ensemble de la Nouvelle-Aquitaine, région qui dispose de la principale étendue forestière en France métropolitaine. et où 9 départements sont considérés comme étant spécialement exposés à ce risque : les feux géants de La Teste-de-Buch et Landiras en 2022, ont marqué le territoire et la mémoire collective.
Les moyens aériens sont pilotés au niveau national : si le Président de la République s'est d'ailleurs exprimé sur la nécessité de les renforcer, encore faut-il que des tours de vis budgétaires ne conduisent pas à empêcher des commandes, comme cela s’est déjà produit. Les moyens actuels ne permettraient pas de lutter efficacement contre d’importants feux survenant de manière concomitante, or ce risque s’accroît.
Encore faut-il, aussi, ne pas faire endosser la facture de la modernisation aux collectivités territoriales. Les véhicules de secours reçoivent, régulièrement, des améliorations dans leur conception. Pour en disposer, les Départements – financeurs majoritaires des Services Départementaux d’Incendie et de Secours (SDIS) – ont davantage de dépenses qui ne sont pas compensées par de nouvelles recettes. Depuis la départementalisation intervenue au tout début de ce siècle de nombreux matériels ont été renouvelés, cependant le parc de véhicules spécialisés dans les feux de forêts n’est pas partout dimensionné pour faire face aux aléas induits par les conséquences du réchauffement climatique : en Nouvelle-Aquitaine, en 2022, trois départements figuraient parmi les mieux dotés (Gironde, Landes, Charente-Maritime) en camions-citerne feux de forêt, alors que d'autres comme la Haute-Vienne l'étaient faiblement. Si la contribution des Départements aux budgets des SDIS a été en hausse depuis 2005 (une fraction de la Taxe Spéciale sur les Conventions d'Assurance a alors été affectée aux SDIS), les investissements ont connu une période creuse entre 2011 et 2017. Des manques restent, à l'évidence, à combler.
Les pompiers disposent d'un personnel professionnel qui est complété au niveau local par des volontaires indemnisés en fonction de leurs interventions. Leur formation doit être régulièrement actualisée, leur disponibilité négociée auprès d'employeurs qui peuvent avoir des difficultés ou des réticences à les libérer sur le champ lorsque c'est nécessaire, et certaines zones peinent à disposer d’assez de candidatures. Si ce n’est pas le Centre de Secours le plus proche qui peut assurer une intervention selon le moment de la journée où intervient l'alarme, le temps d'arrivée sur site des soldats du feu s'en ressent. En cas de vigilance extrême, des équipes sont prépositionnées, comme cela a été le cas cet été en Lot-et-Garonne et en Charente-Maritime, à proximité des secteurs à risque.
La sensibilisation des populations, l’entretien de l’espace rural et forestier tout comme la maîtrise de l’urbanisation sont des enjeux majeurs. Or, les documents d'urbanisme sont critiqués pour leur mise en œuvre du principe légal du Zéro Artificialisation Nette, au point que le législateur apporte régulièrement des assouplissements, poussé par ceux qui s'en prennent à ce qu'ils appellent l'écologie punitive. Expliquer que l'interdiction de construire dans des espaces boisés et naturels relève aussi de la protection des vies humaines en cas d'incendie d'ampleur donnerait plus de poids aux réponses négatives faites à certaines demandes de permis de construire. L’exemple de ce qui s’est passé à Marseille cette année montre aussi que les risques ne se limitent pas à la ruralité, mais concernent aussi la propagation à des espaces urbanisés. S’il est indispensable de renforcer les plans de prévention des incendies de forêt, d’entretenir les pistes, le réseau hydraulique, d’appliquer les obligations légales de débroussaillement, de réduire le mitage, d’agir sur les interfaces forêt-habitat, il est aussi nécessaire de mieux penser la lutte contre un feu s'étendant jusqu'à affecter une zone urbaine et de concevoir la re-végétalisation du tissu urbain – incontournable pour réduire les conséquences sur les populations du réchauffement climatique – en prenant en considération les contraintes de la lutte contre l’incendie. Un impératif dès aujourd’hui pour préparer demain. Pour faire face aux défis des feux en Nouvelle-Aquitaine et apporter les réponses indispensables, ruraux ou urbains, nous sommes tous concernés.
A Saintes, le 20 août 2025.